Prévoyance : le 1,5 % cadres est révisé par la Cour d'appel de Paris

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11 mars 2020 Théophile Robert 4090 vues

La Cour d'appel de Paris a pris une décision exceptionnelle quant à la prévoyance des cadres en entreprise suite à une plainte d'un syndicat. Désormais, l'affectation du reliquat du 1,5 % cadres dans la prévoyance aux frais de santé est autorisé par la loi.

Le 1,5 % cadres (1,5 % Tranche A) ou affectation par priorité à une garantie décès de la contribution patronale obligatoire réservée à l'encadrement

Reconduites par l'ANI (Accord national interprofessionnel) du 17 novembre 2017, les dispositions de la convention collective nationale des cadres de 1947 obligent les employeurs à verser une cotisation obligatoire à une compagnie d'assurance ou mutuelle pour leurs cadres et équivalents. Cette cotisation est de 1,50 % de la tranche de rémunération inférieure au plafond de la Sécurité Sociale et est connue sous les noms de « 1,50 % Tranche A » et de « 1,5 % cadres ». Elle est affectée à la couverture des garanties décès par priorité ; ne pas respecter cette obligation peut coûter très cher à l'employeur. En effet, il risque de devoir aux ayants droit du cadre décédé à trois fois le plafond annuel de la Sécurité Sociale (une somme légèrement supérieure à 120 000 euros en 2020).

Le 26 août 1994, l'Agirc (Association générale des institutions de retraite des cadres) avait précisé que « l'expression par priorité signifie que plus de la moitié de la cotisation obligatoire de 1,50 % doit être consacrée à la couverture du risque décès ». Elle doit donc s'élever à 0,76 % de la « Tranche A », laissant 0,74 % à disposition pour des garanties supplémentaires. Pour autant, avait également été décidé que ce taux restant ne pouvait être consacré qu'à des risques lourds comme une incapacité ou invalidité, en y proscrivant par prudence les frais de santé.

Un syndicat avait saisi la justice pour l'affectation de la cotisation aux frais de santé

Le contentieux rencontré par la justice avait donc été le suivant : un employeur avait mis en place un régime de protection sociale avec 1 % dédié à la prévoyance et 1,8 % aux frais de santé. Mécontent, un syndicat représentatif du personnel avait accusé l'employeur de ne pas respecter la cotisation minimale du 1,5 % cadres en argumentant que les 1,8 % dédiés aux frais de santé ne pouvaient pas y être inclus d'après l'interprétation littérale des dispositions conventionnelles.

Pour étayer sa demande, le syndicat avait cité la loi du 14 juin 2013 de sécurisation de l'emploi qui avait entériné le dispositif mis en place par l'ANI du 11 janvier 2013. Cette loi avait séparé prévoyance et frais de soins de santé en rendant obligatoire la couverture consacrée aux frais de santé pour les salariés.

La décision unique de la Cour d'appel de Paris en matière de prévoyance des cadres

Mais la demande du syndicat a été rejetée par la Cour d'appel de Paris. Elle a expliqué que, malgré la distinction des frais de santé et risques lourd en 2013, la CCN du 14 mars 1947 et l'ANI du 17 novembre 2017 qui prenaient le pas n'excluaient pas les frais de santé des avantages de prévoyance financés par l'employeur. En effet, seule l'affectation prioritaire de la cotisation à la couverture décès est impliquée dans ces deux textes. « Dès lors, pour vérifier si l'employeur respecte son obligation de cotiser en matière de prévoyance à hauteur de 1,5 % (...), il doit être tenu compte de la cotisation patronale versée pour le financement de la garantie frais de santé », signale la Cour d'appel.

« Cet arrêt est intéressant parce qu'il s'agit d'une décision rendue pour la première fois non pas sur le fondement de la CCN de 1947 mais sur l’ANI du 17 novembre 2017. De plus, c'est la première fois, à notre connaissance, que la jurisprudence se prononce sur la question de la cotisation affectée par priorité à la couverture décès. Il ressort, au regard de cette jurisprudence, qu'un employeur cotisant 0,76 % au titre d'une garantie décès et 0,74 % au titre de garanties incapacité, invalidité et/ou frais de soins de santé remplit son obligation au titre du 1,50 décès. Sauf à ce que cette décision fasse l'objet d'un pourvoi et soit cassée par la Haute Cour, elle est plutôt une bonne nouvelle pour les entreprises dans le cadre de leur obligation d’assurer leurs salariés pour les garanties santé », allègue le juriste au service conseil contentieux collectif de CNP Assurance Olivier Labes à l'Argus de l'Assurance.

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